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L’errance canine : une réalité au cœur d’Abidjan

Reportage

 

La survie animale en milieu urbain est une réalité souvent ignorée dans des métropoles. A Abidjan, des chiens au détour des ruelles ou sur des trottoirs, sillonnent au quotidien les quartiers de nombreuses communes. Leur présence, bien visible, est empreinte de difficultés et de solitude. Notamment pour ceux qui prennent le temps de les observer. Une situation  qui met en lumière la vie de ces errants à 4 pattes, les initiatives de citoyens et le défi pour les autorités de trouver des solutions.

A Bracodi , un quartier d’ Adjamé, il est 7h 50mn. Au milieu d’une circulation,  une  meute de chiens errants traverse une rue. Les compagnons de l’homme  avancent prudemment, flairant l’air avec des mouvements hésitants, dans un bruit des klaxons retentissant autour d’eux. Ils se déplacent en silence, la démarche nerveuse trahissant l’inquiétude d’être pris dans une mer d’acier.  Surpris, les conducteurs s’arrêtent brusquement pour éviter ces visiteurs inattendus.

Certains automobilistes lèvent les yeux au ciel, exaspérés. D’autres observent les animaux avec une certaine compassion. À travers les vitres des voitures, des enfants les pointent du doigt. Les riverains, malgré l’habitude, portent sur eux, des regards empreints de sentiments partagés : compassion, lassitude, et parfois, une tristesse discrète pour ces âmes sans foyer.

« Dieu seul sait le nombre de morsures causées par des chiens en errance dans ce pays.», lance l’un d’entre eux. Il ne s’empêche pas de décliner son identité, se plaignant du festival matinal des canins.  «  Moi  Laurent Zemblé, j’ai horreur d’une telle situation. Il faut  un minimum de conditions à remplir avant de posséder un chien. Leurs  propriétaires auraient assumé l’entière responsabilité des actes néfastes que causent  ces bêtes  y compris l’emprisonnement. »,se plaint-il, avant de traverser la chaussée.

Autres lieu, d’autres scènes

Sous un ciel gris, un chien au pelage ébouriffé, mêlant des teintes de brun et de noir, déambule lentement dans une rue à Colombie, un quartier derrière Sococé,  au 2 Plateaux, dans la commune de Cocody. Ses yeux, empreints d’une mélancolie profonde, témoignent de jours passés sans abri ni maître.

« Jolie Po », lui crie à quelques mètres, un enfant qui le reconnaît visiblement. Mais le chien, avec son museau effilé, se préoccupe à fouiller le sol, à la recherche de miettes ou d’un reste de repas abandonné. Ses pattes usées trahissant les kilomètres parcourus. Il se dirige  le long des bâtiments bordés de poubelles débordantes et de cartons humides. Là-bas, se mêlent des odeurs oscillant entre celles des restes de cuisine. Des passants le regardent d’un œil indifférent et furtif,  le voyant comme une simple ombre parmi les murs ternes des habitations d’en face.

Un peu plus loin, au lieu, dit:  »Ancien Marché », se trouvent des groupes de chiens.  Les côtes saillantes, ils sont  rassemblés près des poubelles qu’ils fouillent frénétiquement.  Laissant des détritus éparpillés dans leur sillage.  Leurs mouvements furtifs amplifient la sensation d’insécurité et de désolation. Des passants évitent de croiser leur regard, murmurant des paroles inquiètes avant de faire des détours pour ne pas s’approcher trop près. « Il vaut mieux prendre des distances », se propose l’un d’entre eux.

Un phénomène en augmentation

Le chien est sans doute l’animal domestique le plus répandu en Côte d’Ivoire. Le Club des amis canins de Côte d’Ivoire (CAC-CI), estime à environ neuf millions leur nombre. Soit un peu moins que la moitié de tous les êtres humains vivant  sur le territoire. Le Laobé, étant assurément la race la plus représentée. A en croire certains habitants, la solution réside dans une meilleure éducation des citoyens à la responsabilité envers les animaux de compagnie.

 

«Je pense que le rapport de l’homme avec l’animal domestique est une question d’éducation tout simplement. Me concernant par exemple, j’ai grandi avec des animaux, leur présence est ancrée en moi. À mes yeux, ce ne sont pas juste des bêtes, mais aussi des membres à part entière de la famille. Et aujourd’hui, de nombreux Ivoiriens ont ce sentiment-là», a déclaré Audrey Monteil, la présidente du Comité de protection des animaux de Côte d’Ivoire(Capaci). Selon elle, les sollicitations pour récupérer, le plus souvent dans la rue, des compagnons à quatre pattes égarés, errants ou abandonnés sont légion. Mais la capacité du CPA pour y faire face est très limitée, a-t-elle indiqué.

Divagation ou errance ?

Pour le directeur des services vétérinaire de Côte d’Ivoire, le Docteur Vessalo Kallo, beaucoup d’études aujourd’hui montrent que ces animaux ne sont pas réellement des chiens errants.

«En Afrique, de nombreuses études ont montré que c’est seulement entre 15 et 20% des chiens que nous voyons dans les rues, qui sont réellement des chiens errants.  Le reste, ce sont des chiens divagants. C’est-à-dire des chiens qui ont des propriétaires et dont, pour un problème de malnutrition, sont obligés de sortir,  allant vers des poubelles. Et selon la réglementation, la divagation animale est interdite.», a-t-il signifié.

Le bien-être animal, un défi national

Si dans le monde, certaines villes ont opté pour des abattages systématiques, la Côte d’Ivoire est liée par des conventions. Celles-ci  ne l’y autorisent pas.  Elle a opté pour le bien-être des animaux domestiques, un sujet émergent. La stratégie étant entre autres, d’informer les propriétaires sur des pratiques de soins respectueuses des animaux. Surtout en matière d’alimentation, de logement, et de santé.  Beaucoup reste à faire au niveau de la promotion des libertés essentielles du bien-être animal.  A savoir, le droit d’être exempté de peur,  la détresse, la malnutrition, etc.

Perez Épée

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