En Côte d’Ivoire, Vincent Toh Bi Irié, figure montante de la présidentielle ivoirienne, dénonce un processus électoral qu’il juge biaisé et dangereux pour la démocratie. Ce, à quatre mois de l’élection prévue en octobre 2025.
Dans une salle sobre, baignée de lumière tamisée à Abidjan-Cocody, la voix de l’ancien préfet d’Abidjan résonne avec gravité. Ce jeudi 19 juin, face à un parterre de journalistes et de sympathisants, Vincent Toh Bi Irié ne mâche pas ses mots lors d’une conférence de presse: « Le parrainage, tel qu’il est conçu aujourd’hui, est un frein à la démocratie. »
Candidat déclaré à la présidentielle d’octobre 2025, Vincent Toh Bi dresse un tableau sombre du processus qui conditionne l’éligibilité des prétendants au fauteuil présidentiel. « Ce mécanisme, imposé en 2020 et encore alourdi par l’ordonnance du 7 mai dernier, repose sur des fondations techniques, politiques et sociales profondément défaillantes », accuse-t-il, d’un ton calme mais ferme.
Au cœur de ses critiques : l’obligation pour chaque candidat de récolter au moins 1 % de parrainages d’électeurs inscrits dans la moitié des régions du pays. Ainsi que dans les deux districts autonomes d’Abidjan et Yamoussoukro. Une exigence qui, selon lui, ignore les réalités du terrain.
Terrain miné
« Il faut aller dans les villages, parfois très reculés, où l’accès est difficile. Où certains mots d’ordre communautaires empêchent tout simplement la collecte des signatures. », explique-t-il. Il évoque des zones où les clivages ethniques rendent périlleuse la simple mention d’un nom de candidat. Puis, souligne enfin un autre danger : la peur.
« En 2010-2011, des citoyens ont été massacrés pour leurs supposés choix politiques. Aujourd’hui encore, demander à quelqu’un de signer une fiche de parrainage, avec ses informations personnelles, c’est l’exposer à des représailles », insiste-t-il. Il s’interroge : « Peut-on réellement parler de liberté électorale dans de telles conditions ? »
Une CEI sous tension
Vincent Toh Bi remet en question la posture même de la Commission électorale indépendante (CEI). Ce, au-delà, a-t-il dit, du dispositif technique et des défis logistiques. Il dénonce une institution « figée », qui « se contente d’appliquer des textes injustes selon lui. Sans chercher, a-t-il poursuivi, à jouer son rôle fondamental de médiateur et de facilitateur ».
« Une CEI sans âme, qui applique des règles iniques, ne peut produire ni paix ni confiance .», prévient-il. Pour lui, il est impératif que l’organe électoral évolue vers une dynamique plus inclusive et arbitrale. Sous peine souligne-t-il, de nourrir la défiance et les tensions à l’approche du scrutin.
Appel à l’ouverture
À quelques mois de l’élection, l’appel de Vincent Toh Bi Irié sonne comme un avertissement. Derrière ses mots, se dessine une revendication claire : celle d’un processus électoral transparent, juste, et véritablement ouvert à toutes les voix.
« Le parrainage ne devrait pas être un filtre d’exclusion, mais un moyen de stimuler le débat démocratique », conclut-il. Dans la salle, cessent les murmures. Pour beaucoup, l’ancien préfet a parlé, c’est à présent au pays d’écouter, crient certains.
Loba Perez